Synonyme de qualités bien françaises (plaisir, gourmandise, raffinement), la pâtisserie a traversé les siècles en donnant constamment matière à de nouvelles créations et recettes, dont beaucoup sont encore consommées de nos jours.
Cette discipline a aussi été fertilisée par le progrès scientifique, les grandes découvertes et l’audace de certaines cours royales.
Retour sur ce métier séculaire, dont l’histoire a si bien su épouser celle de notre pays.
L’histoire de la pâtisserie en quelques dates
- IVème siècle avant JC : La première corporation des pâtissiers fut fondée à cette époque: la corporation des pastillariorum
- 1270 : Début de la réglementation du métier
- 1379 : Ecriture du premier manuscrit culinaire par Guillaume Tirel, dit Taillevent
- 1470 : Impression du Viandier
- 1506 : Provenchère, pâtissier à Pithiviers, crée la crème à Pithiviers ou crème d’amande
- 1533 : Apparition des macarons, des madeleines à la cour de France, et import des premières glaces. La pâte à choux est inventée par Popelini, cuisinier de Catherine de Médicis, sept ans plus tard
- 1600 : Apparition estimée du thé, du café et du chocolat en France
- 1660 : Vatel invente la crème Chantilly au château du prince de Condé
- 1683 : Apparition supposée du croissant à Vienne, qui sera introduit par Marie-Antoinette à la cour en 1770
- 1720 : Stanislas Leczinski ex-roi de Pologne beau-père de Louis XV, crée le célèbre baba
- 1796 : Les trois frères Julien créent le savarin
- 1808 : Utilisation par la maison Félix de Paris de la brioche, dans sa forme actuelle
- 1812 : Benjamin Delessert réussi à clarifier le sucre de betterave
- 1828 : Le Hollandais Konrad Van Houten fabrique la première poudre de cacao
- 1835 : Les marrons glacés font leur apparition ainsi que le fondant et les pâtes cuites
- 1840 : La génoise aux blancs montés est créée par Duchemin, Chiboust invente le Saint honoré et Gazeau imagine le Tant pour tant
- 1847 : Les poches avec leurs douilles apparaissent grâce à Aubriot et Trottier
- 1850 : Le pâtissier parisien Siraudin invente la recette de la ganache
- 1865 : Quillet invente la crème au beurre, le mille-feuille apparait dans les boutiques, et le français Mege-Mouries invente la margarine
- 1870 : Le chocolat au lait est créé par Daniel Peter.
- 1879 : La bûche de noël fait son apparition à la maison Charabot
- 1889 : Escoffier crée la pêche Melba
- 1891 : Création du Paris-Brest
- 1984 : La première école nationale de la pâtisserie est créée à Yssingeaux
- 2005 : Ouverture à Blois du premier établissement de ce qui deviendra le Groupe Feuillette
1/ La pâtisserie durant la Préhistoire et l’Antiquité
Les racines de la pâtisserie remontent probablement à 7 000 ans, pendant le néolithique. On pense que les « premiers gâteaux » consistaient en de simples mélanges de farine, de lait et de miel, que l’on laissait ensuite dessécher sur des pierres chauffées au soleil.
Bien plus tard, ce sont les Grecs qui donneront son nom au premier gâteau : l’ « Obélias » est alors synonyme « offrande ». On imagine sans peine la pâtisserie à quelque chose d’exceptionnel, fait pour rendre hommage aux Dieux.
Pourtant, on ne peut pas encore véritablement parler d’art ou de discipline, tant les femmes et hommes n’auront pendant longtemps accès qu’à de la farine et du miel. Pour parler de pâtisseries au sens où nous l’entendons aujourd’hui, il faudra attendre l’utilisation conjointe des œufs, du beurre et du sucre.
Rappelons quand même que la consommation des œufs est immémoriale : l’homme préhistorique aurait consommé des œufs de cane et d’oie, les Grecs aussi, les Chinois des œufs de pigeon, Les phéniciens des œufs d’Autruche et les Phéniciens des œufs de paon bleu. Mais ils ne seront utilisés que bien plus tard dans la création culinaire, à fortiori pâtissière.
Si les ingrédients de base mettent du temps à s’agencer pour constituer la pâtisserie en tant que telle, cela n’empêche pas les professionnels de s’organiser, d’ailleurs étonnamment tôt. Ainsi, la première corporation dite de « Pastillariorum » apparaîtra à Rome au IVème siècle avant notre ère.
2/ La pâtisserie durant le Moyen-Âge
Durant le Haut Moyen Age, les quelques gâteaux existants comme les rissoles ou les beignets se préparent chez soi. La pâtisserie de l’époque était lourde, à base de fromage. Parmi les recettes les plus renommées on trouvait les Talmouses de Saint-Denis, mais aussi les Darioles d’Amiens (tartelettes de crème couvertes de bande de pâte). Ces ancêtres des flans pâtissiers étaient composés de farine de maïs, d’œufs, de sucre, de lait et de vanille et ont été dégustés au temps des rois. Aujourd’hui, on retrouve ce dessert sous différentes formes de par le monde : Pasteis (Portugal), Custard (Grande-Bretagne) ou Dàn tà (Chine). En France, on consomme également les Gobières (flans à la crème), les Poupelins (flans au fromage) et autres Eschaudez.
Au Xième siècle, on aurait découvert le fameux Muffin : certains historiens avancent que le mot viendrait de l’ancien français mouflet qui signifie mou et tendre. Peu après, les Croisés découvrent la canne à sucre et ses propriétés ainsi que l’ancêtre du feuilletage, le Bourreck.
Les boulangers, qui louent leur four, restent encore peu sollicités pour les garnitures sucrées, encore très rares. Cette situation va progressivement évoluer avec une demande croissante pour les gâteaux. Une demande que les boulangers ne peuvent plus satisfaire, obligés de limiter leur production aux grandes fêtes (Noël, Pâques… ).
Un métier qui se réglemente et s’anime
Pour combler le vide existant, la corporation des Oubloyers voit le jour en 1270 sous la férule de Saint-Louis. Les Oublies sont alors des sortes de gaufres minces faites d’une pâte légère sans levain, saisies entre deux fers plats et chauffées au rouge. Les oubloyers, dont la confrérie se place sous la protection de Saint-Michel, auront également la charge de fabriquer les hosties pour les églises françaises.
Au Moyen-Âge, la France compte déjà de nombreux métiers : les Patéiers (pâtissiers), les Eschaudeurs (fabricants d’échaudés), les Fouaciers (fabricants de fouaces), les Gasteliers (marchandes de gâteaux), les marchands de gaufres, de beignets, etc…. Les Patéiers seront d’ailleurs les premiers artisans à inventer au 14ème siècle une animation commerciale en ornant leur magasin et en attirant les passants avec une lanterne de papier de couleur, sur lequel des dessins étaient mis en valeur par la lumière. Ce siècle voit également le premier manuscrit culinaire être écrit en 1379 par Guillaume Tirel (Taillevent).
Les droits progressent aussi, puisque c’est au XVème siècle qu’une ordonnance viendra interdire de prendre des apprentis pour toute période inférieure à 5 ans.
3/ La pâtisserie à l’époque moderne
Au XVIème siècle : la Renaissance
Parmi les créations / apparitions notables :
- La crème d’amandes, par le pâtissier Provenchère à Pithiviers
- Des glaces, pour la 1ère fois en France par Cassati
- La pâte à choux, par le chef pâtissier Popelin
- Les macarons et les madeleines apparaissent à la cour de France en 1533
- Le Mont-Blanc, dont l’arrivée est supposée en 1620 depuis l’Italie (d’autres prétendent qu’il serait né dans les cuisines du salon de thé Angelina au XXe siècle)
L’histoire de la pâtisserie en France est déjà riche lorsqu’en 1566 apparaît la corporation des « pâtissiers ». Charles IX leur octroie de nouveaux statuts en créant le titre de « maître de l’art de pâtissier et d’oublayer ». Pour y prétendre, il fallait exécuter un chef d’œuvre et prêter serment « de garder fidèlement le métier et d’en observer les ordonnances ».
Cette époque voit aussi les techniques progresser sensiblement : on commence à utiliser l’air pour monter les blancs d’œufs et la crème, et on intègre la levure.
Au XVIIème siècle : les temps modernes
Parmi les créations / apparitions notables :
- Le café et le chocolat par Anne d’Autriche, la fabrication de praline, la première chocolaterie…
- La pâte feuilletée, par Claude Gelée en 1630
- Les tartelettes amandines, par Raguenau
- Le croissant en 1683, lors du siège de Vienne par les Turcs (introduit à la cour de France par Marie-Antoinette en 1770 et dont la forme finale ne prendra en qu’1920) et ses dérivés que sont le pain au chocolat, le pain aux raisins
- Les premières pièces en sucre tiré, grâce au confiseur Luigi Fidèle.
Les préparations gagnent en raffinement, avec l’arrivée de deux incontournables : le financier et le mille-feuille. Le premier est créé par les sœurs de l’ordre des Visitandines, avec un goût un peu trop amer. Il faudra attendre 1890 pour que le suisse Lasne ne ressuscite le gâteau en lingot, que s’arracheront les financiers de la Bourse de Paris, quartier d’implantation de sa boutique !
Quant au mille-feuille, sa première recette est élaborée par François Pierre de La Varenne, dans son ouvrage Cuisinier François en 1651. A cette époque, on n’utilise pas de vanille mais une crème aromatisée au kirch et au rhum. Or ce n’est qu’en 1867 que le tout Paris redécouvrira cette spécialité dans le magasin d’Adolphe Seugnot, rue du Bac.
Au XVIIIème siècle : les Lumières
Parmi les créations / apparitions notables :
- Le baba au rhum et la madeleine, par Stanislas Leczinski (beau-père de Louis XV)
- Le pastillage avec l’italien Della Pigna
- Le cannelé, dans les cuisines du Couvent des Annonciades à Bordeaux
- L’introduction du Kouglof
Au siècle des Lumières, un bouillonnement de découvertes vient enrichir la liste des pâtisseries : brioche, biscuit à la cuiller, nombreuses spécialités régionales… Des migrants allemands et polonais font également voyager le gâteau en Amérique, pour créer ensuite le cream cheese puis le cheesecake. Un siècle prolixe qui marque aussi le développement des pâtes feuilletées, puis feuilletées-levées.
4/ La pâtisserie à l’époque contemporaine
Au XIXème siècle
La profession pâtissière se trouve encadrée d’un coté par la boulangerie, produisant déjà différents gâteaux, de l’autre par la charcuterie, qui propose des friands et autres pâtés. Cela ne l’empêche pas de préciser ses recettes, ses modes de fabrication, de faire progresser sa technologie, son outillage et d’affiner ses matières premières.
On est au siècle des grands noms, comme Antonin Carême (né en 1783), instigateur des pièces montées en choux, du nougat, des meringues, des poupelins, des croquants, du biscuit à la cuillère ou encore… de l’éclair. L’impulsion donnée ici va se poursuivre au siècle suivant et s’enrichira de pâtisseries célèbres, à l’instar du Paris-Brest. C’est aussi une époque où émergent des maisons aujourd’hui encore réputées, et où la profession continue de s’encadre : autorisation des organisations syndicales par la loi du 21/03/1884, et naissance en 1902 de la Confédération Nationale de la Pâtisserie.
Au XXème siècle
De grands noms (Darenne, Duval, Seurin, Léveillé, Mahieux, Michot, Jacquelin, Aubinot…) surgissent lors des premières décennies et dont les créations orneront de nombreux livres culinaires. Ils seront suivis par d’autres générations.
Dans les années 1950, un personnel abondant et accommodant laisse à la place à des professionnels plus exigeants. Mais les fabricants de matières premières et les grossistes investissent dans la recherche de fabrications intermédiaires, entre les matières de base et les produits finis. Une véritable recette de succès, tant elles facilitent et rationalisent leur tâche.
Parmi nos pâtissiers contemporains, Gaston Lenôtre restera le plus illustre. Auteur de plusieurs livres et fondateur de l’école gastronomique éponyme, il est une icône, le chef de file d’une « nouvelle pâtisserie » marquée par plus de fraîcheur et de liberté.
La nouvelle pâtisserie
On parle de nouvelle pâtisserie car la plupart des crèmes ou des mousses aujourd’hui utilisées n’étaient pas connues avant les années 1970. Les méthodes et techniques (montage en cercle ou en cadre) sont alors mieux adaptées et assurent aux crèmes et aux mousses plus de régularité et de netteté.
Les desserts gagnent en créativité (habillage, dessus), intègrent des ingrédients naturels et adoptent des décorations plus épurées, pour mieux mettre en valeur l’ensemble de la création. L’esthétique joue à plein et les décors au cornet sont délaissés pour des techniques rationnelles (décalque sur du chocolat, modelage de formes simples).
A partir de 1986, quelques acteurs s’illustrent par des ouvrages majeurs : Daniel Giraud (« Le pâtissier-chocolatier »), Gérard-Joël Bellouet (« L’art du dessert », en 1992) et l’incontournable Pierre Hermé (« La Pâtisserie de Pierre Hermé », en 1995). Ce dernier fondera un véritable empire.
Conclusion
L’histoire de la pâtisserie est d’une richesse insoupçonnée et les créations françaises y tiennent une bonne place.
Nous espérons qu’elle vous donnera des clés pour apprécier notre métier et de notre passion.
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